Universitaires, acteurs associatifs, militantes et élues des régions du nord étaient toutes présente à cette table ronde sur le thème « Evaluation des mécanismes de promotion de la représentation politique des femmes au Maroc ». L’objectif étant une évaluation concrète et concertée des mécanismes de représentation politique des femmes mais aussi un échange et un partage des expériences.
L’ensemble des femmes présentes à cette rencontre sont formelles, seule une représentation égale de tous les citoyens, hommes et femmes dans les organes de prises de décision de l’Etat est à même de parachever le processus de consolidation d’un régime démocratique. Dans une déclaration faite à Actuelles.ma, Omayma Achour, présidente de Jossour FFM interpelle la nouvelle équipe au pouvoir « Je suis optimiste, et je lance un appel fort au nouveau Gouvernement pour prioriser les droits des femmes dans les politiques publiques et mettre en oeuvre les dispositions de la constitution, particulièrement la création d’une autorité et la lutte contre toute les formes de discrimination forte qui reflète le dynamisme de notre société civile ».
Même son de cloche chez la représentante de la Fondation Friedrich Ebert Stiftung, Beatrize Herrera, qui rappelle que «La fondation Ebert est une fondation politique allemande qui milite fermement à la valeur universelle de l’égalité. L’égalité de tous les citoyens devant la loi, l’égalité des chances hommes/femmes, l’égalité au suffrage. Les progrès réalisés par le Maroc en matière d’égalité entre les femmes et les hommes y compris dans le domaine de la représentation politique sont indéniables, Or ils sont jugés insuffisants pour une grande partie de la société civile du pays ». Evoquant les dernières élections législatives du 7 octobre 2016, elle rappelle que « La représentation féminine au parlement reste faible comparativement aux fortes attentes de la société civile qui réclame l’effectivité des droits constitutionnels des femmes ».
Pugnaces et déterminées !
Répondant positivement à l’invitation de Jossour et de la Fondation Ebert, plusieurs femmes élues et représentantes de la société civile sont venues de presque toute la région du nord pour participer à cette table ronde. L’une après l’autre, elles ont témoigné librement et sans langue de bois de leurs vécus et de leurs expériences en tant que femmes ayant choisi de participer à la vie publique et politique au sein de leur communauté. « Toutes ces expériences vont contribuer à appuyer les recommandations de l’étude ‘’Evaluation des mécanismes de promotion de la représentation politique des femmes au Maroc’’ que Joussour va mener pour « explorer toutes les pistes pour augmenter la participation politique des femmes » , insiste Rhizlaine Benachir, vice-présidente de JFFM « Cette étude permettra de proposer de nouveaux mécanismes qui permettront aux femmes d’être de vrais acteurs de changement au niveau politique, social, économique et environnemental» .
En listant sans fard les témoignages de toutes ces femmes, la conviction du non -partage de pouvoir est ressortie, la domination reste toujours masculine. Beaucoup de chemin reste à faire. Et surtout ne demandez pas à Fatima-Zohra, Alyaa, Amina ,Naima ou Ibtissam, toutes députées, comment arrivent-elles à se débrouiller à la maison pendant la campagne électorale et comment mènent-elles un combat qui n’est certes pas égale à égal ! Entre les réflexions misogynes, parfois de la part de leur propre camp, l’agressivité et l’autorité, les obstacles dressés de partout, le non soutien du parti, l’impact parfois négatif sur leur vie de famille, elles savent se battre pour avoir le pouvoir qui ne leur est pas donné facilement. Ces femmes ont compris que leur destin ne dépendait que d’elles et qu’il ne faut rien lâcher.
Les Recommandations de Tanger
Au fil des débats et des réflexions, réalités et contraintes du terrain à l’appui, c’est dire l’ampleur du chantier qui attend les prochaines candidates pour 2021. Cependant, les participantes, élues, conseillères, militantes, chercheures sont convaincues qu’avec une force intérieure qui leur fait ignorer les réticences encore si fortes dans notre société, elles mèneront le combat. Plusieurs recommandations, dites recommandations de Tanger ont vu le jour. La parité hommes-femmes et l’APALD au coeur du débat ont été les plus citées. Dorénavant, pour les prochaines échéances électorales, il va falloir avoir autant de femmes que d’hommes sur les listes. La parité est désormais réclamée. Les mesures de discrimination positive (liste et quotas) s’avèrent désuètes. Quand à l’article 19 de la Constitution et l’APALD, il a été recommandé de les travailler amplement en veillant à l’application des mécanismes de lois déjà existants mais mal employés.
Comme l’argent est le nerf dans toute bataille électorale, une recommandation de taille s’est avérée nécessaire, celle du financement et de la préparation des campagnes en plus de la formation et l’accompagnement. Puisque des changements sont à prévoir dans le travail des élues et l’évolution des familles, lorsqu’elles vont s’impliquer dans la vie politique, il faut prévoir des structures (crèches, aides à domicile, gardes pour enfants, et autres ). Côté partis politiques, ces derniers doivent appuyer leurs élues et promouvoir le leadership féminin avec l’adoption au sein du parti, de la parité horizontale et verticale. Enfin une recommandation non moins importante, celle de faire de la question féminine une priorité nationale. Les médias et journalistes à leur tour devraient s’impliquer d’avantage dans ce travail, avec une médiatisation plus avantageuse des activités des femmes élues notamment celles des collectivités territoriales.
Certes ce sont des recommandations et des propositions pour de nouveaux mécanismes et de bonnes pratiques pour une meilleure représentativité mais c’est aussi la voix des citoyennes en faveur de la parité en politique selon l’esprit de la Constitution de juillet 2011.