Le dossier des ouvrières saisonnières dans les champs de fraises en Espagne continue à faire parler de lui. Lors d’une conférence de presse, l’Instance nationale de coordination des associations féministes a publié un mémorandum appelant, à promouvoir et à protéger les droits des ouvrières saisonnières en Espagne. Latifa Bouchoua, présidente de la Fédération de la Ligue de droits des femmes (FLDF), nous explique le pourquoi de ce mémorandum.
Vous êtes 4 associations à se réunir pour relancer de nouveau ce dossier connu sous le nom de “cueilleuses de fraises de Huelva” et publier ce mémorandum, pourquoi ?
Latifa Bouchoua : Cette initiative s’inscrit dans le suivi et l’accompagnement du dossier des ouvrières saisonnières par les organisations civiles féministes, afin d’évaluer l’ensemble des étapes de l’opération et assurer la protection sociale de cette catégorie. Faut-il le rappeler que ,l’Instance nationale de coordination des associations féministes, qui rassemble, la fédération de la Ligue des Droits des Femmes, l’Union de l’Action féminine, l’association Jossour et l’association marocaine de lutte contre la violence a l’égard des femmes, avait déjà fait état de sa grande préoccupation au sujet des ouvrières agricoles marocaines engagées dans des fermes espagnoles suite aux informations qu’ elle a recueillies et celles rapportées par certains médias espagnols et notamment le journal « Espanol » au sujet des actes de harcèlement dont sont victimes certaines ouvrières saisonnières marocaines dans les champs de fraises de certaines régions espagnoles et plus précisément la Huelva.
Cette instance n’est pas restée les mains liées et a réagi très vite ?
Oui tout à fait .Cette instance avait justement adressé le 24 mai dernier un courrier dans ce sens au Ministère de l’emploi , au Ministère des affaires étrangères et au délégué chargé des marocains résidant à l’étranger et des questions l’émigration pour leur demander d’intervenir afin d’assurer la protection nécessaire à cette catégorie de citoyennes des affres des conditions sociales , des agressions et des mauvais traitements et leur garantir des conditions de travail qui préservent la dignité humaine.
Cette affaire a été relatée par la presse espagnole, par des associations et des syndicats de la région et par la suite, la justice espagnole s’est saisie du dossier ?
La justice espagnole s’est saisie du dossier le 27 mai ,et la journée du dimanche 3 juin 2018, a connu un tournant grave dont les détails ont été rapportés par un certain nombre de moyens et sites d’informations, signalant que des centaines d’ouvrières saisonnières marocaines (400 femmes) ont été séquestrées dans une des fermes et transportées à bord d’autocars en vue de les expulser vers le Maroc pour les empêcher de porter plainte à propos de leurs « mauvaises conditions et des agressions dont elles sont victimes ». Toutefois, les forces de sécurité espagnoles s’y sont opposées et ont entrepris de ramener ces ouvrières dans la ferme.
Dans ce mémorandum, vous lancez un appel aux autorités marocaines qui sont bien conscientes de la situation, mais semblent impuissantes, et à la partie espagnole d’assurer la protection juridique et professionnelle conformément aux lois en vigueur ?
Tout en enregistrant avec satisfaction l’intervention de la justice en vue de mener les investigations nécessaires sur cette affaire et d’en assurer le suivi afin de rendre justice aux victimes, l’instance nationale demande aux autorités à informer l’opinion publique de façon claire après avoir démenti existence des agressions dans une des régions espagnoles et accélérer la procédure d’enquête qu’elles disent avoir initié depuis quelque temps en coordination avec les autorités espagnoles. Nous demandons l’intervention en vue d’éviter que les ouvrières en question fassent l’objet de licenciement arbitraire, de tentative d’expulsion en guise de vengeance et les protéger de toutes formes d’humiliation et d’agression auxquelles elles sont exposées en tant que femmes. Nous exigeons d’assurer le suivi des poursuites judiciaires et du procès et leur fournir l’assistance et le conseil juridique nécessaire afin de garantir la protection des droits de ces ouvrières .Enfin, nous demandons à réviser les dispositions des contrats de travail de ces ouvrières de sorte à leur garantir, dignité et travail décent conformément aux conditions, normes et instruments internationaux en maitre de droits humains.